Salle 101

[…] En cette période bénie où le silence des rues laisse perler parfois la douce odeur des gaz d’échappement des blindés qui patrouillent nos rues désormais sûres, la Salle 101 se confine chez elle, tranquille, nue sous ses vêtements, pour t’offrir une émission sensuelle, jolie, agréable, divertissante : un zapping concocté par le fantastique Alfred Abdaloff, une chronique de Ténèbre, roman québécois de Paul Kawczak, proposée par la formidable Georgette Abdaloff, une bafouille sur Bernadette fait du ski, bande-dessinée honteuse de El Don Guillermo, effectuée par le gros Raoul Abdaloff. Et tu voudrais sortir avec tout ça à portée de clic ? Ah ah ah ah, ce que tu peux être bête, public de feu, ah ah ah. D’autant qu’il y a aussi pas mal d’industriel allemand dans tout ça, et une surprise. Non, vraiment, tu ne seras pas déçu-e.

« Nous, à la Salle 101, le confinement, on le vit bien, et toi ? » gloussent en coeur les Abdaloff en reprenant un mojito.

[…] Heureuse, comblée, satisfaite de voir les chars dans la rue, la Salle 101 te propose l’émission d’avant la fin du monde, dans laquelle tu te délecteras du souvenir d’avant, quand tu pouvais librement boire de l’alcool en piétinant les morts : Une vie comme les autres, pathétique roman de Hanya Yanagihara. Manger Bambi, roman assez peu comique de Caroline de Mulder. Le temps fut, novella temporelle de Ian Mc Donald. Profite tant que ça dure.

« Toi je sais pas, mais moi ça va mieux », nous explique la librairie française.

[…] Ravie d’assister de son vivant à la fin du monde et à l’effondrement de la société spectaculaire marchande que ses plus ardents valets persistent à défendre malgré son état de mort cérébrale, la Salle 101 se fait légère, douce, amoureuse, subtile : Rosewater 2, insurrection, roman youpichou de Tade Thompson. The Expanse, un jeu de rôle tiré de la série de romans éponymes. Cadavre exquis, roman argentin cannibale d’Augustina Bazterrica. Que de nuevo, bolludo ?

« Les couchers de soleil, c’est comme l’imaginaire français, c’est vraiment de la merde », balbutie Raoul A. après sa troisième Corona.

[…] ravie que la préfecture incite les français à rester chez eux devant Twitter pour les faire militer tranquille sans que ça ne menace jamais rien ni personne, la Salle 101 se rit de l’ultra gauche et s’abonne au magazine Le Point, après toutefois t’avoir parlé de quelques trucs ouf guedins : Orwell, une bande-dessinée de Christin et Verdier. Bienvenue à Sturkeyville, recueil de nouvelles de Bob Leman. On te l’a dit, ouf guedin.

« C’est pratique, le masque, dans les conventions de SF, parce que les lecteurs et les écrivains ont quand même de sacrés problèmes d’hygiène », constate Jeanne P.

[…] Libérée délivrée comme Patrick, la Salle 101 reste digne en chroniquant des oeuvres de droite républicaine : Vita Nostra, roman ukrainien de Marina et Sergueï Diatchenko. Les enfants du temps, film de Makoto Shinkai. Rambo, Last Blood, grand film de Sylvester Stallone. Et ouais.

« Rester soi-même, ne jamais transiger avec mon idéal », prétend Lloyd C.

[…] Scandalisée par les accusations injustes à l’égard du patron des meilleures éditions de Fantasy du monde, la Salle 101 entre en résistance et retrouve une fougue viriliste en te parlant de trucs tout à fait fous : Solénoïde, roman youpiyeah de Mircea Cartarescu. Provenance, roman youpiyou d’Ann Leckie. Voilà qui bon, voilà qui est bien.

« Je vous jure, elles étaient d’accord », explique on ne sait plus trop qui.

[…] Horrifiée par l’acharnement coupable d’une justice aux ordres du politiquement correct qui rappelle les pires heures de l’Apartheid, la Salle 101 soutient sans réserve Isabelle et Patrick Balkany et leur dédie cette émission consacrée à pas mal de choses diverses, voire désagréables : Les affaires de la rue de Rome, recueil inégal de la mystérieuse Adorée Floupette. Résolution, roman de Li-Cam. Tralala.

« Gnaaaa, ngaaaaaa, fluckrrrr, gnaaaaaa », explique le jury du Grand Prix de l’Imaginaire, avant de faire sous lui.

[…] Toujours contente, toujours fière, toujours en avant vers l’avant, justement, la Salle 101 te rééduque par les ondes, car tu en as besoin. Chiens de guerre, roman avec des chiens sans Bernard Werber, mais avec Adrian Tchaikovsky. Quand on parle du diable, roman funky lol de Joseph Denize. Winter Trauma, dernière BD super marrante lolipop de Simon Hanselman. Trop stylé.

« Toi je c pa mé moi sa va mieu », explique la science-fiction française.

[…] Enivrée par la hauteur de vue gouvernementale, la Salle 101 s’envole loin, loin, loin vers les plus hautes montagnes de la pensée, mais n’oublie pas de redescendre pour t’offrir quelques éléments de culture populaire : Star Wars 9, petit film indépendant. Le Mandolarien, petite série indépendante. La mort avec précision, roman de Isaka Kotaro. Winter Trauma, BD comique de Simon Hanselman. N’est-ce pas ouf-guedin ?

« J’ai conçu mon roman comme un festival de la pensée amatricielle », nous explique Alain D. après son quatrième Ricard.

[…] Enfin libérée des hordes moustachues et avinées qui entravent la marche de notre France éternelle, dont elle sait entendre l’appel, La Salle 101 te livre la première émission de l’année, dans laquelle tu entendras parler d’artistes propres, bien sous tous rapports : Jardins de poussière, recueil de Ken Liu. Le roi Arthur, un mythe contemporain, essai numéro un de William Blanc. Winter is Coming, essai numéro deux du même William Blanc. Fi donc, manant.

« En 2020, j’anime une table ronde aux Utopiales de Nantes », se vante Kévin K. devant les gens de l’ANDRA.